Scandale sans précédent dans toute l'histoire de l'opéra, jamais personne n'a entendu le « vrai » Boris Godounov, puisque l'on se refuse encore à jouer la partition telle que Moussorgski l'a écrite. Acceptant avec une incroyable indifférence l'idée reçue selon laquelle il s'agit d'une œuvre inachevée, aux harmonies bizarres, à l'instrumentation maladroite, le monde lyrique n'a connu Boris qu'à travers des révisions qui le dénaturent profonddément. On peut comprendre qu'à sa création cette œuvre ait paru trop singulière, trop « moderne ». Mais aujourd'hui ? M. Le Roux analyse les partitions authentiques, mettant en valeur ce qui constitue le génie du compositeur, ses audaces d'écriture, l'originalité de son orchestration. Mais il s'attache également au texte du livret, dont il met en évidence la force dramatique, et tente de faire le point sur les énigmes qui demeurent, à commencer par la personnalité de Boris, dont on ne sait s'il a dû son trône à un crime, et sa mort à une malédiction.