Percevoir l'univers, c'est construire une relation réciproque entre l'objet et le fait de s'y impliquer soi-même. L'écriture de Proust, ce témoin d'avoir perçu et vécu, charge d'une force créatrice notre confrontation à l'univers, et tire son plein épanouissement du fait d'être lue. La modalité de la formation du sens qui passe par la relation instaurée entre l'auteur et le lecteur relève de démarches descriptives enrichies de mouvements imprévisibles. La variété de ce mouvement pourvue d'une beauté inattendue est chez Proust à l'origine de la notion de drame. Dans ce livre son style est conçu comme l'ensemble d'un système générateur d'éléments dramatiques. Ce style est en outre capable d'un développement continuel : et cela par la discontinuité au sein de la multiplicité de l'écriture, qui nous reporte à la représentation composite du cubisme. La recherche du temps perdu s'achève par la renaissance du passé dans l'écriture au temps à jamais naissant ; et le fruit du travail est dans la recherche même. Le héros raconte comment il a perdu du temps et, ce faisant, en a retrouvé. A nous lecteurs d'associer son univers imaginaire au nôtre. Le style de Proust constitue cet élement médiateur entre les deux univers, étant chargé d'une richesse et d'une précarité toujours recommencées.